Presse Gay et
profs homos, Têtu, Illico, Ex-Aequo
en 2002
En fin août et septembre 2002, Têtu fait l'événement
dans les rues des grandes villes en annonçant la rentrée
des profs homos. Voici quelques extraits du dossier de la rédaction
du magazine parisien.
en 1998
Feu journal Ex-Aequo s'intéressait à l'éducation
sexuelle et aux éditeurs de livres pour la jeunesse. Y abordait-on
l'homosexualité et comment?
en 1995
En 1995, le journal gay gratuit Illico ouvrait le dossier des enseignants gays.
Enseignants gay: les risques du métier. Quelques extraits.
C'est bien connu, les homosexuels sont pédérastes et prosélytes.
Si vous en doutez, installez un téléspectateur de TF1 devant
le 20 H de Claire Chazal un soir de Gay Pride et dites lui que le grand
brun en débardeur blanc et short en bas de l'écran à
droite, et bien c'est Monsieur Martin, le prof de maths du petit dernier.
Maintenant observez. Il y a fort à parier que la réaction
de ce brave père de famille ne s'attardera pas du côté
de l'intelligence mais rejoindra bien vite celui de la peur, une peur conditionnée
et non réfléchie qui irait même jusqu'à fricoter
un instant avec l'instinct de survie. "Mais qu'est-ce qu'il a fait à
mon fils ?" s'affole-t-il. Plein de choses, à commencer par lui
apprendre l'algèbre et à résoudre des équations.
Le problème majeur de l'enseignant(e) homosexuel(le) est d'avoir
à surmonter l'insurmontable. D'aller au-delà des peurs indéracinables
et de dépasser les clichés les plus désuets. Question
pourquoi le petit dernier aurait-il plus à craindre de Monsieur
Martin, homosexuel dans une autre vie, sa vie affective, que sa grande
soeur de Monsieur Benoit, marié et père d'un enfant pour
l'Etat civil ? Réponse parce que le père de famille a lu
il y a quelques années à la une des journaux cette histoire
de prof pédophile. Il a juste oublié entre temps que la victime
était une petite fille et que son agresseur était hétérosexuel,
comme c'est le cas dans la grande majorité des faits divers de cette
sorte. Face à cette peur indestructible engendrée par les
certitudes et la bonne moralité, les profs et instits gay se
préparent eux-mêmes d'emblée à ce que
leur vie privée sexuelle et affective à ses élèves,
parfois aussi à l'administration, et dans un même temps de
considérer l'élève seulement comme un élève,
un auditeur, un cerveau auquel vous devez transmettre des connaissances
et non comme un corps en pleine mutation, un idéal sexuel ou un
objet de fantasme.
Pour Yvon, prof de maths dans un lycée technique privé
de Bretagne, la couverture est facile. Il a 29 ans avec une petite année
d'expérience professionnelle derrière lui. Il est suffisamment
jeune pour que ses collègues ne se posent pas encore trop de questions
sur son Etat civil et suffisamment amoureux pour ne pas fondre
devant ses élèves qui sont de toute façon beaucoup
trop jeunes pour lui. "Et puis, ça m'amuse de les voir se chamailler,
se tripoter, se faire des papouilles et de se mettre des mains aux fesses".
Car le lycéen est allumeur, voire bandant. "Il faut les voir arriver",
note Christian, 35 ans, qui enseigne à des jeunes de banlieue parisienne
de plus de 16 ans sortis du milieu éducatif traditionnel et en difficulté
d'insertion. "Il faut montrer que l'autorité est de ton côté.
Eux, ils exhibent beaucoup leur corps qui à cet âge est très
sexué. Ils se touchent, se tripotent devant toi, se mettent les
mains dans le pantalon en t'écoutant parler. Ils se tâtent
le bout des seins". "A cet âge-là, relève René,
46 ans, prof de lettres et d'histoire dans un lycée technique privé
de banlieue parisienne, ils ont besoin d'estimer leur corps et leur pouvoir
de séduction. "Mais tu imagines pour eux quel est le panard de faire
craquer le prof?" A l'inverse, craquer pour l'élève est le
tabou que tous refusent de faire tomber, à la fois pour soi intellectuellement
et pour le risque que cela représente professionnellement, mais
c'est selon René, "ce qui pend au nez de tout prof gay". (...)
La meilleure parade que n'ait trouvée Joël, instituteur
breton de ans, pour que cela ne se produise pas, est justement d'être
devenu instit et non prof, soit le meilleur moyen pour ne pas avoir à
se retrouver en face de gamin pubères et très sexuels. Un
autre bouclier est de ne rien laisser paraître, de ne brandir aucun
pancarte et de jouer avec le rumeurs Si elles vous arrangent. A 33 ans,
Lucas est prof d'histoire dans un collège de banlieue nord parisienne
dite difficile. En fait de difficulté, le collège accueille
de gamins issus d'une zone très défavorisée où
tous sont d'origine étrangère, rejetés et oubliés
de l'autre côté du périphérique Résultat,
les élèves ont parfois des doutes et Lucas ne dément
pas les rumeurs qui le lient à un jeune prof célibataire
du collège "Je crois que les élèves sentent tout,
dit-il. Mais je ne crois pas être identifié en tant que pédé.
Il ne faut pas perdre de vue que le: élèves ne sont pas des
adultes. La réaction d'un adulte peut-être violente, agressive,
compréhensive, neutre par rapport à l'homo-sexualité.
La réaction d'un élève renvoie à des peurs.
Et cette violence-là n'est pas contrôlée. Les élèves
rejettent l'homosexualité, c'est quelque chose qui les menace".
"Il y a, poursuit-il, des choses que je ne peux pas dire, même à
des 5e. Par exemple, à l'occasion de l'étude de l'Afrique,
j'ai eu des réactions très violentes et très négatives
lorsque j'ai dit, en parlant des populations, que la propagation de l'épidémie
de SIDA n'était pas due aux pédés. C'est une chose
qu'ils n'acceptent pas.(...) Alors, je n'entends pas ce qu'ils disent quand
c'est homophobe. je ne veux pas entendre". Pourtant en salle des profs,
Lucas s'amuse avec son homosexualité. Histoire d'en rire. Peut-être
aussi de se rassurer à l'inter-cours. Et puis, ça lui permet
de faire tout de suite un choix entre les "bons et les mauvais profs".
René non plus ne le cache pas. Il faut dire que c'est plutôt
difficile lorsque l'on est militant très actif dans une association
de lutte contre le SIDA, que l'on partage son temps entre le lycée
et l'association et que l'on est déjà passé à
la télé à ce titre. Yvon lui, encore marqué
par le syndrôme "débutant", préfère attendre
quelques années avant de faire son coming-out, conscient que ça
participera à l'isoler du groupe des autres profs. Mais est-ce vraiment
si grave? Au fond, les profs et les instits gay s'accomodent plutôt
bien de leur particularité, qui ne constitue pas en soi un lourd
désavantage -dans le pire des cas, ils se mettent à dos les
réacs- sauf bien sûr en cas de prosélytisme ou de drague
sévère auprès des élèves. Des exceptions
confirment évidemment la règle. Ainsi P.C., 43 ans, militant
homosexuel et directeur du festival cinématographique "Ouestion
de genre" a subi les attaques de l'administration du lycée du Nord
dans lequel il enseignait, après que le homosexuel dans son équipe.
Suite logique, celui-ci a subi la visite de l'inspecteur d'académie,
une promotion qu'il avait demandée lui a été refusée
et la lettre anonyme adressée au proviseur a été glissée
à l'intérieur de son dossier. Quelques semaines plus tard,
le rectorat lui a fait savoir qu'il était préférable
qu'il quitte l'enseignement intégrer une équipe de chercheurs,
ce qu'il a fait. (...) Autre cas de figure, autre contexte, celui de Joël,
instituteur dans une école primaire privée de Bretagne qui
s'est fait muté en même temps qu'une instit lesbienne pour
cause d'homosexualité. L'histoire est encore plus scabreuse. Joël
a été "outé par une collègue après qu'elle
l'a vu faire ses courses dans un hyper en compagnie d'une folle. Ces révélations
ont été confirmées par la suite au directeur de l'école
par le Président de l'association des parents d'élève
qui l'a vu entrer ou sortir plusieurs fois d'un lieu de drague. Convoqué
par le directeur, Joël s'est entendu dire par ce dernier ne pourrait
pas le couvrir en cas de problème -pourquoi aurait-il eu un .?-
et qu'il a peur que les parents ne l'apprennent. Joël a été
viré de son école puis en a intégré. une autre
le jour où une de ses voisines de palier appelait son nouveau directeur
pour lui dire que celuici recevait souvent des "adolescents seuls".
J'ai l'impression, conclut-il, qu'on me reproche de bien vivre mon homosexualité
et de ne pas chercher à la dissimuler. Je crois qu'ils voudraient
que j'en ai honte (...) On dit que les enfants sont vulnérables
et qu'il faut les protéger. Aux yeux des gens, on représente
un danger de contamination. Alors que c'est justement pour cette raison
que j'ai choisi d'enseigner en école primaire, pour qu'il n'y ait
pas de problème, ni d'ambiguïté". Et pourtant, ils aiment
leur métier. En plus, il parait que les "homosexuels sont "beaucoup
plus nombreux que ce que l'on voudrait bien croire dans l'enseignement".
(...) "On est tellement nombreux dans l'Education nationale disent-ils
d'une seule voix, qu'on devrait se regrouper pour monter un super-syndicat
et faire avancer les choses". Chiche. Fabien Biasutti.